La marée noire américaine commande la prudence avant l'exploitation de l'Arctique

Publié le par Matthieu d'Hauthuille

(AFP) - La pollution monstre dans le Golfe du Mexique commande la prudence avant d'envisager l'exploitation des ressources petrolieres de l'Arctique, qui aiguisent les appetits a mesure que s'ouvrent les voies de passage, estiment des experts reunis a Paris pour le Congres mondial des oceans.
Cette region du monde change plus rapidement que n'importe quelle autre et se rechauffe en moyenne deux fois plus vite, accelerant la fonte des glaces et degageant la route aux supertankers et aux cargos, a la peche et surtout a l'exploitation des hydrocarbures.
"Pres d'un cinquieme des reserves soupconnees de gaz et de petrole non exploitees se situent au nord du Cercle polaire, a 84% offshore", rappelle Lisa Speer, directrice du Programme Oceans au Natural Resources Defense Council, a New York.
"Mais il n'y a personne la haut, aucun secours. Or on n'arrive pas a arreter une maree noire qui survient pres des cotes americaines, l'un des pays les plus riches et les mieux equipes du monde", releve-t-elle.
Pour William Eichbaum, vice-president du WWF-USA, specialiste des politiques marines et de l'Arctique, "si vous avez une crise cardiaque a Manhattan, vous avez de bonnes chances de vous en sortir. Mais au Pole Nord vos chances sont nulles: une maree noire la-bas serait absolument hors de controle".
"On va forer de plus en plus loin des cotes et de plus en plus profondement en mer - 1.500 m sous la surface et 3.000, 4.000 m sous le plancher marin. Cette course en avant exacerbe les risques, sans s'accompagner des avancees techniques necessaires", remarque Julien Rochette, chercheur sur les oceans a l'IDDRI (Institut du developpement durable et des relations internationales).
Ce qui frappe justement, c'est l'absence de progres dans la lutte contre la pollution: "20 ans apres l'Exxon Valdez (un supertanker dont le naufrage a durablement souille les cotes d'Alaska), nous n'avons pas davantage de capacites de reponse en place, ou chacun sait ce qu'il doit faire et ou tout le materiel est pre-positionne", s'insurge Sue Lieberman, directrice-adjointe du Pew Environment Group. "Comme si chacun pensait que ca ne pouvait pas se produire".
"Depuis les annees 1930, aucune region au monde n'a autant d'experience du forage en mer que le Golfe du Mexique. Mais les compagnies ont assure au gouvernement qu'il n'y avait aucun risque d'explosion ou de fuite et il s'est fonde sur leurs expertises pour leur delivrer les permis d'exploiter", reprend M. Eichbaum.
Ce risque, juge-t-il, est inacceptable en Arctique ou les normes d'exploitation varient entre les cinq pays riverains - USA, Canada, Russie, Norvege et Danemark (a travers le Groenland).
"Le Canada applique des normes relativement severes en matiere de prevention, celles des Etats-Unis sont plus souples et d'autres n'en ont carrement pas", note-t-il. "D'ou la necessite absolue d'instaurer des regles de gouvernance collectives", notamment pour la haute mer, hors des juridictions nationales. Et de depasser la base du volontariat pour les rendre obligatoires, complete Lisa Speer.
Plusieurs ONG, soutenues par des elus americains de Floride et du New Jersey notamment, voudraient en Arctique la creation d'un "sanctuaire scientifique", exempt d'activite economique et reserve a la connaissance de ce milieu sauvage, reste coupe du monde par les glaces.
Le WWF a pour sa part renouvele recemment son appel a un moratoire sur le developpement des projets petrogaziers dans les eaux Arctiques jusqu'a mieux en comprendre les risques de pollution.
Sources : TV5.org AFP (06/05/10)

Publié dans POLLUTION

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